Pour le coup, j'ai l'impression qu'on a perdu pas mal du texte, qui s'y prêtait pourtant bien. Tu as ôté pas mal d'informations qui auraient donné un vrai contexte à l'image : la gare de Rennes, l'aspect matériel --> contexte social du perso, et puis ce sourire d'excuse qui devient un simple sourire.
A la lecture du texte original, je trouve qu'on perd en profondeur. Le résultat reste très bon hin, mais pourquoi modifier le texte?

Pour ton style qui s'apparente pas mal à de l'illustration de texte, je pense que le texte doit cadrer d'avantage la scène illustrée pour le rendre accessible (contrairement à de la bd classique où texte et image se complètent quasi également)

Je suis pas forcément clair, si?

En gros, si je dessine une gare avec un train, je n'ai pas forcément besoin de le préciser dans le texte et le lecteur comprendra tout seul. ici ta planche conserve un aspect vague et imprécis dans la scène. Après c'est surement voulu aussi...

J'ai un peu ressenti ça aussi mais je comprends que les photos soient difficiles à trouver. Et puis j'étais bien content de voir un de mes textes exploré sous une manière graphique différente et j'ai trouvé ça chouette.

Netzou, je comprends tes remarques. Je me cherche en core un peu dans le domaine, même si je sais de plus en plus où je veux aller. Je ne sais pas si on perd en profondeur par rapport au texte original, peut-être... Quoi qu'il en soit j'ai essayé de mettre aussi en scene ma lecture du texte de Nicodren. Enfin une description plus une image ferait peut-être trop lourd. Quoi qu'il en soit, si ca te plaît c'est ca l'important.

Message Important :
Ce qui suit entre dans mes délires philosophiques sur la BD et n'engage que moi. Je ne pourrais être tenu pour responsable en cas de maux de tête ou immolations par le feu.

J'ai pas mal réfléchit à ce qui fait que le texte de Nicodren est plus accessible que mes autres réalisations, et je pense que justement j'ai moins joué ici sur la reconstruction que d'habitude.

Je ne sais pas si je fais plus du texte illustré ou de la BD, ou encore du "roman graphique" (ou comment se la jouer)... En fait c'est un peu jouer sur les mots, mais disons qu'à partir du moment où les dialogues ne sont pas dans des phylactères, c'est ptêtre plus de la BD, mais moi je continue à dire que j'en fais. Enfin, définir ce qu'est une BD est certainement un sujet de doctorat.

En fait, pour faire assez simple, je pense qu'il y a deux façons d'aborder la BD, ces deux façons étant intimement liées aux deux grandes fonctions de l'écriture en général, ce qui inclut donc aussi d'autres formes d'expression telles que le roman, cinema, la musique... enfin tout ce qui met en jeu une forme d'écriture. Ces deux aspects ne sont pas clairement distinct mais les oeuvres tendent à privilégier l'une ou l'autre approche.

Il y a tout d'abord une BD mémorielle, qui, tout comme la première grande fonction de l'écriture, représente les choses passées afin que l'on s'en souvienne. C'est largement le cas pour la plupart des BD, de tintin aux blogs actuels où on raconte sa vie. Il n'y a pas besoin que les choses se soient réellement passées en fait, il faut juste que ce soit cohérant. Dans une BD mémorielle, les représentations du monde sont plutôt réalistes, le point de vue narratif est la plupart du temps externe. Les effets se font la plupart du temps grâce à une révélation ; révélation d'un espace, d'une identité, d'un dénouement entre autres.

Ensuite, il y a la BD reconstructionnelle. Comme la seconde grande fonction de l'écriture, le but est moins de raconter que de forcer le lecteur à établir une reconstruction afin de provoquer un effet. C'est beaucoup moins présent dans la BD parce qu'il est souvent très difficile de provoquer convenablement l'effet. La fonction reconstructionnelle n'est pourtant pas absente des BD mémorielles, l'élipse par exemple est une forme de reconstruction qui fonctionne très bien. Cette phrase ne sert à rien c'est pour voir si tu lis attentivement. Cependant, baser un effet, voire une planche entière, sur une élipse est un pari pour le moins risqué. Les représentations du monde peuvent être indifférement réalistes ou hyper stylisées, les dessins de Reiser par exemple sont assez reconstructionnels. Le point de vue narratif n'a lui non plus aucune tendance générale.

Dans la BD reconstructionnelle, la redondance a une forte tendance à s'effacer, alors que dans la BD memorielle, la redondance est plus présente. Si je compare le dernier truc fait avec le texte de Nicodren et ce que je fais d'habitude, le texte est très redondant par rapport à l'image, alors que d'habitude j'évite cela, le point de vue est interne mais il n'y a pas cette espèce d'introspection que j'utilise habituellement, et l'effet provient certainement du verbe "suivre" dont les aspects imperfectif, inchoatif, et implicitement(!) semelfactif qui cloture le texte entre en relation avec les aspects perfectif et resultatif du verbe "souvenir". Habituellement, je ne travaille pas ce genre de relations, car je ne provoque pas l'effet de cette manière. Par exemple, pour raconter la même chose à moi seul, J'aurais commencé par "Elle était assise sur le sièege devant moi", j'aurais évité de mettre la phrase "Elle a prit les rails en photo" et je n'aurais certainement pas mis de texte dans la dernière image...

C'est pas faux.

C'est si compliqué ?

C'est surtout très instructif !

Tu veux dire que maintenant tu es sûr que je suis totalement cinglé ?

Une riche réflexion. Ton approche et ton questionnement de ce qu'est la BD pour toi sont très intéressants. Quand commence-t-on un livre sur le sujet ?

Pour moi, a partir du moment ou il y a histoire, dessin et texte en relation on est dans de la bd. Et c'est bien ce que tu fais!

C'est comme ca que je le vois.