Merci pour vos encouragements !
Je pense effectivement à un texte illustré, plus qu'à une bd.
La suite !
Chapitre 2
La ville était en fête. Cinq ans seulement après sa création par un groupe de pionniers, l'Empire venait de lui accorder une charte de ville Impériale. L'improbable agencement de bicoques branlantes et de ruelles boueuses, noyé constamment sous un épais nuage de vapeur allait prendre son essor. Le charbon extrait des nouvelles mines alentours se révélait être d'une qualité exceptionnelle et rare. L'arrivée d'un couple de douaniers l'année précédente avait été un signe qui ne trompait pas. Les deux officiers avaient un enfant de 5 ans. La petite famille Escart fut reçue avec des honneurs dignes d'un prince. Un an plus tard, ils faisaient partis de la ville comme s'ils y étaient nés. En ce jour de fête, Oscar alors âgé de 6 ans passait l'examen médical obligatoire pour tous les enfants. L'examen dit du « métal ». Une longue série de tests qui pouvaient durer toute la journée.
De la fenêtre de l'hôpital flambant neuf situé en hauteur, loin de la vapeur nauséabonde de la ville, Oscar contemplait le lac. On attendait avec impatience l'arrivée du premier cargo en provenance de la Capitale. Ce n'était pas n'importe quel cargo. Il s'agissait du fleuron de la flotte, le tout dernier né des arsenaux de l'Empire. Avec ses révolutionnaires moteurs et chaudières à vapeurs miniaturisés il pouvait voler plus vite et plus longtemps mais surtout transporter une cargaison de charbon équivalente à une année de production. Il le vit de loin. D'abord simple point noir haut sur l'horizon il crut à une crotte de mouche sur le carreau. Puis, très vite le point se mit à grossir pour prendre forme peu à peu. On aurait dit une énorme baleine d'acier et de bois. Le métal étant rare et précieux seuls les fleurons de la flotte impériale pouvait se permettre une coque métallique comme celle-la. Oscar suivait la lente descente du mastodonte vers le ponton tout juste terminé. Soudain, le flanc gauche du cargo de mit à gonfler. Le petit garçon ouvrir la bouche pour dire quelque chose quand l'explosion retentit. L'immense bâtiment, hors de contrôle s'écrasa sur le quai, poursuivant sa route destructrice, déchiquetant de la ville dans une explosion titanesque de vapeur, de métal en fusion, de bois et de terre. Derrière Oscar les médecins et infirmières le moment de stupeur passé se mirent aussitôt à suivre les ordres du médecin en chef, un vétéran de la dernière guerre. Le jeune garçon contemplait le cataclysme la bouche grande ouverte en un cri silencieux.
Les paupières de l'adolescent se soulevèrent lentement. Sa respiration courte trahissait l'angoisse qu'il ressentait. L'aube n'était pas encore là. Depuis quelques temps il revivait encore et encore la scène de la catastrophe au cours de laquelle ses parents trouvèrent la mort. Tout comme plus de 6000 personnes, soit plus de la moitié de la population de la modeste ville. Oscar devint après ce jour là un orphelin, parmi tant d'autres. La seule différence, c'est qu'il devait normalement être rapatrié vers la capitale, étant maintenant un pupille de l'Empire. Mais il savait ce que devenaient les orphelins des fonctionnaires de l'Etat. Des militaires. Il ne voulait pas. Il détestait les armes. Son père lui avait souvent raconté les horreurs du dernier conflit qui avait vu l'Empire écraser les Républiques Orientales. Ses parents rêvaient pour lui d'un destin plus calme, comme ingénieur vaporiste ou mieux, enseignant. Lui, un seul désir le rongeait : être l'incarnation du héros de papier de son enfance. Tel Marlson Prieur, il explorerait le monde à bord de son habitation volante... Alors Oscar, malgré tous les efforts des hommes de l'Empire pour le trouver, fut porté disparu. L'enfant apprit à se débrouiller seul. Il fouillait les alentours et ramenait de temps en temps assez de métal pour se payer une modeste chambre dans une vielle maison à l'écart de la ville, sur les hauteurs. Oscar se leva. Il alluma une bougie et s'habilla en silence à sa lumière orangée. Dans un coin de la pièce trônait fièrement l'équipement acheté grâce à l'argent de sa dernière trouvaille. Avec ça, il pourrait explorer la chaîne de montagne qui bouchait l'horizon et qui grimpait très haut dans le ciel.
Il sangla les dernières lanières de cuirs de son manteau, passa son sac au dos, s'assura de n'avoir rien oublié, s'avança vers la table branlante et s'empara du panama blanc ayant depuis longtemps perdu sa forme originelle. Le jour de la catastrophe, son père, pour le convaincre d'aller passer la visite médicale, lui avait posé son propre chapeau du dimanche sur la tête : un magnifique panama d'un blanc immaculé. Il l'avait acheté au fameux tailleur Pana'ma, d'où son nom... Oscar le visa sur sa tête. Il souffla la bougie, sorti dans la nuit. La ville endormie s'étalait à ses pieds. Les étoiles se reflétaient sur la surface calme du lac. L'adolescent se tourna vers la montagne en souriant.
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